Behind the Ballot Boxes: The Presence of the Far Right
Derrière les urnes : la présence de l'extrême droite

Prepared by the researche : Mekdam ALBARBOUR* M2. Sciences Politiques – Sciences Sociales du Politique, Sciences Po Strasbourg- France
Democratic Arabic Center
Journal of Social Sciences : Thirty-fifth Issue – March 2025
A Periodical International Journal published by the “Democratic Arab Center” Germany – Berlin
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Abstract
This article analyzes Félicien Faury’s book (Ordinary Voters: An Inquiry into the Normalization of the Far Right). The study highlights the social and economic dynamics that drive support for the Rassemblement National in France. Through a sociological approach, the author examines how factors such as economic inequality, identity crisis, and the rejection of minorities influence electoral choices. This critical analysis seeks to understand the mechanisms behind the normalization of far-right voting and its impact on the French political landscape..
Résumé
Cet article analyse l’ouvrage Des électeurs ordinaires : Enquête sur la normalisation de l’extrême droite de Félicien Faury. L’étude met en lumière les dynamiques sociales et économiques qui favorisent le vote en faveur du Rassemblement National en France. À travers une approche sociologique, l’auteur examine comment des facteurs tels que l’inégalité économique, la crise identitaire et le rejet des minorités influencent les choix électoraux. Cette analyse critique vise à comprendre les mécanismes de normalisation du vote d’extrême droite et leur impact sur le paysage politique français.
- Introduction
l’ouvrage “Des électeurs ordinaires : Enquête sur la normalisation de l’extrême droite”, écrit par Félicien Faury et publié aux éditions Seuil en mai 2024, s’inscrit dans les débats contemporains sur les transformations des comportements électoraux en France.
Faury, sociologue et politiste, est un spécialiste reconnu de la sociologie politique. Docteur en sciences politiques et chercheur postdoctoral au CESDIP, il s’est particulièrement intéressé au vote pour le Rassemblement National (RN). Ses travaux incluent des publications majeures, telles que Sociologie politique du Rassemblement national (2023), et plusieurs articles de référence sur les dynamiques électorales et les rapports entre classes sociales, racisme et politisation.
Ce nouvel ouvrage prolonge ces recherches en examinant les logiques sociales et territoriales qui ont permis la normalisation du vote d’extrême droite dans le sud-est de la France, une région emblématique pour ce courant politique.
Le choix de cet ouvrage s’explique par son approche originale, qui permet de comprendre les dynamiques sociales et identitaires derrière le soutien croissant au RN en France. L’ouvrage s’inscrit dans une réflexion plus large sur les rapports sociaux, les inégalités et l’identité nationale.
L’actualité politique, marquée par une montée des partis populistes en Europe, rend cet ouvrage particulièrement pertinent pour des recherches sur la radicalisation politique et l’ascension des extrêmes.
La note de lecture visera à présenter l’ouvrage de Faury, tout en procédant à une analyse critique. Cette double approche sera illustrée par une évaluation de la méthodologie de l’auteur, ainsi que de ses apports théoriques.
En nous concentrant sur les principales idées de l’ouvrage, nous nous interrogerons sur la manière dont Faury articule les dimensions sociales, économiques et culturelles dans l’explication du vote pour l’extrême droite. Cette réflexion se fera à travers une lecture critique, avec des références aux apports de la littérature existante sur le sujet.
Les axes de cette analyse sont :
- Un résumé détaillé de l’ouvrage et une présentation des principales thèses soutenues par l’auteur.
- Une réflexion critique sur les apports théoriques de l’ouvrage, notamment l’analyse sociologique des dynamiques sociales sous-jacentes au vote pour l’extrême droite, en discutant sur les points forts et les limites de la méthodologie employée par Faury.
L’ouvrage de Félicien Faury, accessible à tous, décrypte les raisons du succès du Rassemblement National.
Il s’adresse autant aux chercheurs qu’au grand public, offrant une analyse sociologique approfondie des motivations des électeurs d’extrême droite. En dépeignant ces derniers comme des citoyens ordinaires, l’auteur invite à une réflexion collective sur les causes et les conséquences de cette montée.
- Présentation de l’ouvrage
- Résumé structuré de l’ouvrage (vous trouverez dans l’annexe 1 un résumé exhaustif de l’ouvrage.)
Ce livre de 224 pages propose une structure claire et progressive : après une introduction qui pose les bases, l’auteur développe son propos en cinq chapitres distincts, avant de conclure en apportant une synthèse éclairante.
- Les grandes lignes des arguments principaux :
Dans Des électeurs ordinaires, l’auteur analyse les raisons du vote pour l’extrême droite en France, notamment en faveur du Rassemblement National (RN). L’ouvrage se penche sur les mécanismes sociaux qui expliquent l’adhésion à l’extrême droite, en s’intéressant particulièrement aux électeurs ordinaires issus des classes populaires et des petites classes moyennes. Faury explore des phénomènes sociaux comme l’inégalité économique, la crise identitaire, et le rejet des minorités, notamment les immigrés, qui sous-tendent ce vote.
- Chapitres et articulation :
- Introduction : Faury expose la problématique du vote pour l’extrême droite, en mettant l’accent sur les facteurs sociaux qui influencent les électeurs, on trouve que L’ouvrage analyse les raisons qui poussent les électeurs du sud-est de la France à voter pour le Rassemblement National. En s’appuyant sur des entretiens approfondis, l’auteur montre que le vote d’extrême droite est lié à des facteurs sociaux complexes, notamment au sentiment d’injustice sociale, à des représentations raciales et à des expériences personnelles. Le racisme, loin d’être un élément marginal, est au cœur des motivations de ces électeurs. L’étude souligne que ces choix ne sont pas uniquement individuels mais s’inscrivent dans des dynamiques collectives et historiques. L’objectif est de comprendre les mécanismes sociaux qui favorisent l’essor de l’extrême droite plutôt que de stigmatiser les individus.
- économies morales : L’ouvrage explore les raisons du vote d’extrême droite en France, en particulier dans le Sud-Est. Il met en évidence que les préoccupations économiques, liées à l’emploi et à la redistribution, sont intimement liées à des représentations négatives de l’immigration. Les électeurs d’extrême droite expriment un sentiment d’injustice fiscale et une peur de la concurrence sociale, qu’ils attribuent à l’immigration.
Cette peur est renforcée par une vision essentialisée des minorités ethnoraciales, perçues comme des profiteurs du système. Le racisme structure ainsi les opinions économiques et sociales de ces électeurs, alimentant un discours de victimisation et de rejet de l’autre.
- (chez nous). Classements et déclassements territoriaux : Faury analyse comment L’extrême droite prospère en région Sud-PACA, non seulement dans les zones en difficulté économique, mais aussi dans des régions attractives. Les habitants, souvent issus des classes moyennes, se sentent menacés par les changements sociaux et résidentiels. Ils perçoivent une perte de contrôle sur leur environnement, liée à l’arrivée de nouveaux habitants et à la transformation des quartiers. Ces craintes, alimentées par des discours sur le grand remplacement, les poussent à voter pour des partis comme le Rassemblement National, dans l’espoir de retrouver un ordre social qu’ils jugent perdu.
- islamophobies du quotidien : L’auteur explique que l’islamophobie en France est profondément ancrée dans les représentations sociales, notamment chez les électeurs d’extrême droite. Les musulmans sont souvent perçus comme une menace pour l’identité nationale et les valeurs françaises.
Le voile est au cœur des représentations négatives, symbolisant à la fois l’oppression féminine et un projet d’islamisation de la société.
Cette islamophobie est alimentée par un racisme plus généralisé et sert à renforcer les divisions sociales. Les discours politiques et médiatiques contribuent à renforcer ces stéréotypes, marginalisant les musulmans et alimentant les tensions.
- votes blancs : L’auteur analyse les motivations des électeurs du Rassemblement national (RN), oscillant entre empathie face à leurs difficultés socio-économiques et une minimisation du racisme inhérent à leur vote. Ce vote reflète une hiérarchie raciale où les électeurs cherchent à se distancer des minorités en affirmant leur position dominante. Le texte explore aussi la distinction entre bonnes et mauvaises migrations, notamment en ce qui concerne les réfugiés ukrainiens, et montre comment des électeurs issus de l’immigration stigmatisent d’autres minorités pour se réaffirmer comme bons Français. L’enquête souligne également la peur de déclassement social des électeurs populaires, qui voient dans leur soutien au RN un moyen de défendre leur identité et leur statut. Enfin, la racialisation est vue comme un processus en constante évolution, où les électeurs d’extrême droite, bien qu’inquiets de leur propre statut, renforcent leur discours raciste pour préserver l’ordre racial perçu.
- logiques d’une normalisation : L’ouvrage examine la normalisation du vote pour le Rassemblement National (RN) et l’évolution de sa légitimité. Le vote pour Marine Le Pen, autrefois stigmatisé, devient de plus en plus socialement accepté, influencé par des interactions sociales et une homogénéité politique locale. L’auteur critique l’idée que ce vote résulte d’un repli social, soulignant qu’il reflète plutôt des sociabilités partagées et des identités de groupe. Les électeurs du RN expriment un rejet des élites politiques et de la gauche, et voient en Le Pen une alternative crédible, malgré leurs doutes. Enfin, la stratégie de dédiabolisation du RN, amorcée dès sa création, a permis au parti de se normaliser tout en préservant son identité protestataire.
- Conclusions et propositions centrales : Cette recherche analyse le vote pour le Rassemblement National (RN) en prenant au sérieux les témoignages des électeurs pour comprendre leurs motivations, valeurs et perceptions. Elle met en lumière les préoccupations socio-économiques et raciales qui nourrissent leur soutien à l’extrême droite, notamment la compétition pour les ressources et les services publics, ainsi que le ressentiment envers les minorités et l’État. Le vote pour le RN reflète un désir de préserver un ordre social perçu comme menacé. Il est crucial de reconnaître la dimension raciale de ce soutien, qui dépasse les seules préoccupations économiques. La lutte contre cette dynamique nécessite des réponses politiques et sociales adaptées.
- Positionnement dans l’espace scientifique
- Contexte académique : L’ouvrage s’inscrit dans les débats actuels sur l’ascension de l’extrême droite en Europe, un sujet largement étudié en sciences sociales, notamment en sociologie politique et en sciences politiques. La recherche sur le vote pour l’extrême droite met en lumière les dimensions sociales et identitaires qui motivent ces choix, tout en s’opposant à une approche purement économique ou idéologique.
- Apports novateurs ou lacunes : Faury propose une lecture novatrice de l’islamophobie, la considérant non seulement comme un phénomène religieux mais aussi comme un vecteur de construction identitaire et de racisme ordinaire. Il met en exergue la dimension territoriale du vote d’extrême droite, en insistant sur les perceptions de déclin dans certaines régions. Cependant, certains pourraient regretter un manque d’analyse des influences nationales et internationales qui façonnent ces dynamiques.
- Réflexion critique sur l’ouvrage et la démarche
- Évaluation critique de l’ouvrage
- Forces
Félicien Faury propose dans son ouvrage une analyse sociologique rigoureuse et nuancée de la montée de l’extrême droite.
Grâce à une enquête de terrain approfondie menée dans le sud-est de la France, il démontre la pertinence d’une approche qualitative pour comprendre les motivations des électeurs du Rassemblement National. En donnant la parole à des individus ordinaires, l’auteur révèle la multiplicité des facteurs qui influencent leurs choix politiques, tels que les questions d’identité, les inégalités sociales et les perceptions de l’immigration. Cette étude met en évidence l’évolution de l’extrême droite et sa capacité à s’ancrer dans certaines couches de la population, tout en soulignant les liens étroits entre les choix politiques individuels et les contextes socio-économiques.
- Faiblesses
L’ouvrage de Faury, bien qu’utile, ne parvient pas à saisir pleinement la complexité du phénomène étudié. En effet, s’il met en évidence l’importance des déterminants socio-économiques, il néglige les aspects idéologiques qui sous-tendent le vote d’extrême droite. Une analyse plus fine de ces mécanismes permettrait de mieux comprendre comment ces positions se diffusent et se légitiment au sein de la société. Par ailleurs, bien que l’approche soit ancrée dans un travail de terrain, la représentation des classes sociales et des groupes minoritaires pourrait être enrichie par des perspectives davantage comparatives ou historiques, afin d’offrir un contexte plus large de l’évolution de ces phénomènes dans la société française.
- Retour réflexif sur la démarche globale
Cette lecture a considérablement enrichi ma compréhension des électeurs de l’extrême droite. En combinant analyses individuelles et processus sociaux collectifs, l’ouvrage offre une vision nuancée et complexe de ce phénomène.
L’approche sociologique adoptée m’a particulièrement intéressée, car elle permet de dépasser les explications simplistes et d’appréhender les enjeux politiques contemporains sous un angle critique. Cette démarche est essentielle dans ma formation, car elle m’incite à questionner les fondements théoriques et méthodologiques de la recherche en sciences sociales.
- Conclusion
- Synthèse des apports de l’ouvrage
L’ouvrage de Félicien Faury offre une analyse nuancée et approfondie des ressorts du vote d’extrême droite en France, en prenant pour exemple le Rassemblement National. L’auteur déconstruit les stéréotypes et révèle la complexité des motivations de ces électeurs, en montrant comment des facteurs socio-économiques, des sentiments d’injustice et des préoccupations identitaires se conjuguent pour favoriser l’adhésion à ce parti.
- Pistes pour des travaux ou réflexions futures
L’étude du vote en faveur de partis d’extrême droite, notamment le Rassemblement National, ouvre de nouvelles perspectives de recherche, par exemple :
Liens entre perceptions raciales et économiques, il serait pertinent d’approfondir l’analyse des interactions complexes entre les perceptions raciales et les préoccupations économiques dans les choix électoraux, en adoptant une perspective comparative européenne.
Enfin, une analyse plus approfondie de l’interaction entre les structures de pouvoir, les inégalités économiques et raciales dans des régimes politiques variés pourrait permettre de mieux comprendre l’interdépendance entre ces facteurs dans la formation des préférences politiques et l’instabilité des régimes démocratiques.
Un résumé exhaustif de l’ouvrage de Félicien FAURY
Titre : Des électeurs ordinaires. Enquête sur la normalisation de l’extrême droite
Auteur : Félicien Faury
Éditeur : Seuil
Date de publication : 3 mai 2024
ISBN : 978-2-02-151894-8
Cet ouvrage m’a attiré en raison de l’actualité politique. Je souhaite mieux comprendre les mécanismes qui poussent des individus à voter pour des partis d’extrême droite, en m’y intéressant par une approche nuancée et sociologique du phénomène, qui s’éloigne des stéréotypes souvent associés aux électeurs d’extrême droite.
L’ouvrage s’inscrit parfaitement dans l’étude des comportements électoraux, des idéologies politiques, il permet d’illustrer les concepts théoriques vus en Sociologie politique en Europe.
Félicien Faury s’attaque à une question centrale de la sociologie politique contemporaine :
pourquoi un nombre croissant de personnes, souvent perçues comme ordinaires, adhèrent aux idées de l’extrême droite ?
L’auteur s’attache à dépasser le stéréotype souvent associé aux électeurs d’extrême droite, Il explore les processus qui conduisent des individus à adhérer à des discours politiques radicaux, en lien avec leurs expériences personnelles et leur environnement social.
Il s’intéresse à la façon dont les expériences individuelles se croisent avec les enjeux politiques plus larges, où cet ouvrage contribue à une meilleure compréhension des transformations politiques et sociales en cours, en particulier en ce qui concerne les questions d’identité, de territoire et d’inégalités.
Félicien FAURY [1] est un sociologue et politiste, docteur en sciences politiques et post-doctorat au CESDIP (Centre de recherches sociologiques sur le Droit et les institutions pénales).
Il a réalisé la thèse : Vote FN et implantation partisane dans le Sud-Est de la France : racisme, rapports de classe et politisation.
Ses travaux ont donné lieu à plusieurs publications majeures, dont deux ouvrages de référence : Des électeurs ordinaires (Seuil, 2024) et Sociologie politique du Rassemblement national (Presses Universitaires du Septentrion, 2023).
Il est également l’auteur de nombreux articles publiés dans des revues scientifiques et de chapitres d’ouvrages collectifs. Ce livre de 224 pages propose une structure claire et progressive : après une introduction qui pose les bases, l’auteur développe son propos en cinq chapitres distincts, avant de conclure en apportant une synthèse éclairante.
- Introduction
En étudiant le vote Rassemblement National, l’ouvrage analyse les conditions sociales du vote en faveur du RN, en considérant les phénomènes politiques comme des phénomènes toujours également sociaux, produits et entretenus par des configurations spécifiques dont les citoyens électeurs sont à la fois les électeurs et les témoins.
- L’extrême droite par le bas : une enquête de terrain dans le sud-est de la France :
Le sud-PACA (sud-Provence-Alpes-Côte d’Azur), berceau historique de l’extrême droite en France durant la seconde moitié du XXe siècle, a constitué le terrain d’enquête de l’auteur.
Ce dernier s’est intéressé aux logiques profondes de la normalisation progressive de ce vote, cherchant à comprendre comment, du point de vue des électeurs, cette orientation électorale a pu acquérir une telle légitimité dans des contextes locaux spécifiques. L’échantillon d’électeurs rencontrés est issu de diverses classes sociales, avec une surreprésentation des classes populaires stabilisées et des petites classes moyennes, notamment dans les secteurs de l’artisanat, du petit commerce et de la sécurité.
- Parole ordinaire
Le choix de l’entretien comme méthode d’échantillonnage s’explique par la nécessité de saisir les nuances et les complexités des motivations profondes des électeurs. Comme le rappelle l’auteur (Faury, 2024, p. 18) l’intérêt pour la politique étant limité chez la majorité des citoyens, les choix électoraux sont souvent guidés par des considérations plus intimes, liées aux valeurs, aux expériences personnelles et aux représentations sociales.
L’objectif de cette approche est de mettre en lumière les sens communs qui sous-tendent le vote d’extrême droite, en allant au-delà de l’acte de vote lui-même.
- Qualifier le racisme
L’étude sociologique du racisme est inévitable, particulièrement lorsqu’elle s’appuie sur une approche empirique. L’analyse des représentations des électeurs du Rassemblement National a rapidement mis en évidence la centralité de cette question (Faury, 2024, p. 19).
L’auteur a bien expliqué que le racisme est un phénomène complexe et multiforme, qui ne se limite pas à des actes individuels, il s’inscrit dans des structures sociales plus larges, où les préjugés raciaux s’appuient sur des hiérarchies construites historiquement. Ainsi, pour comprendre les manifestations individuelles du racisme, il est essentiel de les replacer dans ce contexte plus global.
Les bonnes raisons de voter pour le RN n’existent qu’au sein de situations produites collectivement qui rendent ces raisons bonnes (Faury, 2024, p. 29).
L’analyse a privilégié une approche contextuelle des récits et des visions du monde racialisés. Il s’agit de relier les expériences individuelles à des dynamiques sociales plus larges. Ainsi, les préjugés ne sont pas uniquement le fruit de subjectivités isolées, mais s’inscrivent dans un environnement social qui les nourrit et les transforme.
- Les conditions sociales du vote RN
Cet ouvrage entend donc comprendre le vote d’extrême droite, il convient de dépasser l’analyse individuelle et de s’intéresser aux dynamiques collectives qui le sous-tendent. La sociologie qu’il propose ne s’attache pas aux biographies individuelles mais aux processus sociaux plus larges : relations de pouvoir, normes, héritages historiques.
Les individus interrogés dans cet ouvrage ne sont pas des cas isolés mais des révélateurs de ces processus collectifs qui favorisent l’essor de l’extrême droite. En d’autres termes, ce sont les mécanismes sociaux, et non les individus eux-mêmes, qui constituent le cœur de cette analyse. Cette approche ne nie pas la complexité des parcours individuels mais souligne qu’une enquête, aussi approfondie soit-elle, ne peut appréhender la totalité d’une existence. Les personnes interrogées sont ainsi des points d’entrée pour saisir des phénomènes plus vastes.
Il décrypte les facteurs socio-politiques qui poussent les électeurs d’extrême droite du sud-est de la France à faire ce choix. Aucun élément isolé n’explique à lui seul cette orientation, mais c’est la combinaison de ces différents facteurs qui les conduit à voter pour l’extrême droite.
- Première partie : économies morales.
Pour saisir le vote d’extrême droite, il faut dépasser la dichotomie économique/culturel. Dans le Sud-Est, réputé identitaire, les préoccupations économiques sont omniprésentes mais intimement liées à des représentations négatives de l’immigration.
Le racisme, imprégnant tous les aspects de la pensée, structure aussi les opinions sur le fonctionnement idéal de l’économie. Il s’agit donc de comprendre cette économie morale racialisée, utilisée par les électeurs pour décrire leur situation sociale.
- Immigration et redistribution
L’extrême droite a longtemps lié chômage et immigration, présentant cette dernière comme une menace pour l’emploi des nationaux. Le slogan 1 million de chômeurs, 1 million d’immigrés de trop (Faury, 2024, p. 39) en est l’exemple emblématique. Cette rhétorique vise à mobiliser différents électorats : ceux qui craignent de perdre leur emploi et ceux qui ressentent une injustice fiscale.
Si la figure du voleur d’emplois est moins présente dans les discours des électeurs rencontrés, celle de l’immigré bénéficiant d’aides sociales est omniprésente.
Ces électeurs, souvent des petites classes moyennes et populaires, expriment moins une peur individuelle de perdre leur emploi qu’une colère face à un système qu’ils perçoivent comme injuste. Le chômage, en tant que phénomène social, alimente cette colère et favorise l’adhésion aux discours de l’extrême droite. La perception d’un environnement marqué par le chômage et l’assistanat incite à s’approprier des idées protectionnistes et à rejeter l’immigration, vue comme une cause de ces problèmes.
- Un sentiment d’injustice fiscal
pour comprendre le ressentiment fiscal et comment les travailleurs se sentent exploités et les aides sociales sont perçues comme injustes, on trouve Christophe, sapeur-pompier, qui exprime un profond ressentiment fiscal. Il considère que les travailleurs comme lui sont sucés jusqu’à la moelle par les impôts, tandis que les branleurs (Faury, 2024, p. 44), souvent assimilés aux immigrés, bénéficient indûment des aides sociales.
Ce sentiment d’injustice est largement partagé parmi les électeurs du sud de la France, qui se sentent piégés dans une classe moyenne précarisée. La valorisation du travail contraste avec la condamnation des assistés, perçus comme des profiteurs.
Le ressentiment fiscal se mêle ainsi à une xénophobie latente, alimentée par des stéréotypes sur les immigrés présentés comme oisifs et ingrats.
Les récits d’interactions quotidiennes renforcent ces préjugés, opposant les bons pauvres aux mauvais, et contribuant à une vision binaire de la société.
- La racialisation de l’assistant
L’auteur révèle une corrélation étroite entre les discours anti-assistance et xénophobes, particulièrement dans les milieux d’extrême droite.
Les bénéficiaires de l’aide sociale sont souvent racialisés, perçus comme des mauvais pauvres profitant indûment du système. Cette perception est renforcée par des stéréotypes associant les minorités ethniques à la fraude sociale et à l’inactivité.
Le chômage et la pauvreté de ces groupes sont alors attribués à leurs caractéristiques individuelles ou culturelles plutôt qu’à des causes structurelles (discrimination, inégalités).
Cette racialisation de l’assistance alimente le ressentiment social, justifie les politiques restrictives en matière d’immigration et renforce le soutien à des partis comme le Rassemblement National.
- Comptabilités nationales et préférence étrangère
Les électeurs du Rassemblement national considèrent que l’immigration est une charge pour l’État, détournant des ressources qui devraient bénéficier aux vrais Français (Faury, 2024, p. 56).
Cette perception est renforcée par l’idée d’une préférence étrangère, selon laquelle les immigrés bénéficieraient de manière injuste d’aides sociales au détriment des nationaux.
Ces représentations s’appuient sur une logique de la rareté, où l’économie nationale est perçue comme un gâteau à partager, et où tout ce qui est donné aux immigrés est nécessairement retiré aux Français.
Cette vision binaire, opposant les-nous aux eux, est entretenue par les discours politiques du Rassemblement national, qui jouent sur les ressentiments et les frustrations des électeurs.
- Laxisme de l’état
Les citoyens interrogés estiment que l’État applique une justice à deux vitesses. D’un côté, ils dénoncent un laxisme envers les délinquants, en particulier ceux issus des quartiers populaires. Ils pointent du doigt les politiques qui, selon eux, fermeraient les yeux sur les incivilités et les délits.
De l’autre, ils déplorent une sévérité excessive envers les citoyens respectueux des lois, comme en témoignent les contrôles routiers jugés arbitraires.
Cette perception d’injustice est renforcée par l’idée que l’État accorde des privilèges aux détenus, au détriment des contribuables qui financent les prisons.
Les électeurs interrogés expriment un sentiment d’impuissance face à un État qu’ils jugent trop indulgent et trop faible pour faire respecter l’ordre public.
La dégradation de l’offre scolaire
Les électeurs d’extrême droites interrogées expriment une profonde méfiance envers l’école publique française. Ils perçoivent une dégradation constante de la qualité de l’enseignement dans les établissements publics, notamment en raison d’une mixité sociale perçue comme excessive et d’un sentiment d’insécurité.
Cette défiance est renforcée par un sentiment d’injustice fiscale : ils estiment contribuer largement aux impôts sans en voir les bénéfices, notamment en matière d’éducation.
De nombreux parents, comme Lucie (Faury, 2024, p. 65), investissent un temps considérable pour compenser les manquements qu’ils constatent dans l’école publique et assurer la réussite de leurs enfants.
Ce surinvestissement est vécu comme une contrainte et alimente un ressentiment croissant envers un système éducatif qu’ils jugent défaillant et inégalitaire.
L’évitement par le privé
Les parents choisissant l’école privée pour leurs enfants sont souvent motivés par la recherche d’un environnement scolaire qu’ils perçoivent comme plus sûr et plus propice à la réussite. La dimension religieuse (Faury, 2024, p. 68), bien que présente, n’est pas le principal facteur de choix.
Les parents mettent plutôt en avant la notion de bonne éducation et souhaitent préserver leurs enfants d’un environnement scolaire qu’ils jugent trop hétérogène et où les valeurs qu’ils défendent ne seraient pas suffisamment respectées. Les craintes liées à la mixité sociale et à la présence de certaines religions, notamment l’islam, sont souvent évoquées. Ces parents associent ces éléments à une dégradation du niveau scolaire et à des problèmes de discipline.
L’école privée apparaît alors comme une solution pour assurer la réussite scolaire de leurs enfants et les protéger des influences qu’ils perçoivent comme négatives.
Concurrences reproductives
Le témoignage d’une électrice révèle comment les inquiétudes liées à la reproduction sociale alimentent les discours xénophobes, en plaçant ses propres difficultés d’accès aux services publics en contraste avec une perception déformée des avantages accordés aux immigrés, elle exprime une peur de la concurrence pour les ressources limitées.
Cette concurrence se joue notamment au niveau de l’éducation, où l’école privée est perçue comme la seule garantie d’une ascension sociale. La xénophobie (Faury, 2024, p. 74) sert alors de bouc émissaire, permettant de justifier des inégalités sociales et de renforcer les divisions.
Ce phénomène, loin d’être isolé, souligne comment les discours sur l’immigration peuvent exploiter les craintes liées à la reproduction sociale, notamment chez les femmes, contribuant ainsi à l’essor des partis d’extrême droite.
L’auteur explique que les électeurs d’extrême droite expriment un mécontentement profond envers les politiques sociales, nourri par une peur de la perte de leurs acquis et un sentiment d’injustice face à la redistribution.
Cette peur est exacerbée par une vision essentialisée des minorités ethnoraciales, perçues comme des freins à leur propre ascension sociale et comme des bénéficiaires indus de l’État providence.
Le sentiment d’appartenance à la nation majoritaire, couplé à une interprétation restrictive du mérite et de l’héritage, légitime cette hostilité. Les politiques néolibérales, en remettant en cause l’universalisme des droits sociaux, ont renforcé ces ressentiments en créant une compétition pour des ressources perçues comme limitées, opposant les bons travailleurs aux mauvais pauvres (Faury, 2024, p. 78).
- Deuxième partie : (chez nous). Classements et déclassements territoriaux.
Contrairement à l’idée reçue que l’extrême droite prospère uniquement dans les régions en déclin économique, l’enquête révèle que son succès s’étend aussi à des régions prospères comme la région Sud-PACA. Si cette région est un pôle d’attraction pour les classes aisées, elle est aussi marquée par de fortes inégalités. Les électeurs de l’extrême droite, souvent issus des classes moyennes, se sentent coincés au mauvais milieu (Faury, 2024, p. 80) entre les riches et les plus démunis.
Ils perçoivent leur environnement résidentiel comme menacé par l’augmentation du coût de la vie et la présence de groupes sociaux qu’ils perçoivent comme différents, ce sentiment d’être entre-deux socialement et spatialement alimente leur anxiété et favorise l’adhésion aux discours de l’extrême droite.
- Pressions d’en haut
Les politiques de valorisation touristique et l’attrait pour un cadre de vie privilégié poussent les classes supérieures à s’installer dans ces régions, entraînant une hausse des prix de l’immobilier et une modification du paysage social.
Les habitants d’origine, souvent issus de milieux populaires ou agricoles, se sentent dépossédés de leur territoire et de leur mode de vie, ils perçoivent ces nouveaux arrivants comme des urbains (Faury, 2024, p. 85) qui ne respectent pas leurs traditions et leurs usages.
Ces tensions sociales alimentent un sentiment de déclin et contribuent à l’essor de l’extrême droite dans ces régions.
- Pression d’en bas
La présence de logements sociaux est systématiquement associée à un changement de population, notamment à l’arrivée de familles immigrées, cette association est si ancrée que les inégalités économiques sont souvent interprétées à travers un prisme ethnique. Les habitants expriment des craintes vis-à-vis des quartiers dits estrangers (Faury, 2024, p. 90), où ils perçoivent une concentration d’immigrés, notamment maghrébins et turcs.
Ces représentations raciales sont renforcées par des comparaisons avec des pays étrangers, les quartiers sont ainsi décrits comme des mini-États (Faury, 2024, p. 91) où les cultures seraient étrangères à la culture française.
Ces stéréotypes contribuent à la construction de frontières sociales et spatiales, et à la stigmatisation de certains quartiers.
- L’impossible entre-soi blanc
l’auteur analyse les ressentis et les comportements des électeurs d’extrême droite face à l’évolution de leur environnement résidentiel, il met en évidence une peur profonde de la ségrégation, non pas tant par la concentration des minorités dans certains quartiers, mais plutôt par leur expansion progressive et incontrôlée.
Les enquêtés perçoivent cette évolution comme une menace pour leur qualité de vie, leur sécurité et leur identité. Ils expriment un sentiment d’injustice et de victimisation, lié à l’impossibilité de trouver des coins tranquilles (Faury, 2024, p. 93) où échapper à cette cohabitation forcée. Ce sentiment d’être rattrapé par les quartiers populaires et racisés renforce leur adhésion aux discours d’extrême droite qui promettent un retour à un ordre social jugé plus juste et plus sûr.
- Un centre-ville sans bières
L’enquête montre comment la perception d’un déclassement territorial, lié notamment à la transformation des centres-villes et à l’évolution de la clientèle des commerces, alimente un discours de rejet et favorise l’émergence de sentiments d’insécurité chez une partie de la population, en montrant comment la fermeture des commerces traditionnels et leur remplacement par des commerces jugés étrangers renforcent un sentiment de perte d’identité et de contrôle du territoire. La présence de communautés immigrées, associée à des transformations des modes de vie, est perçue comme une menace pour le mode de vie traditionnel.
Le cas du bar Le Faubourg (Faury, 2024, p. 104) illustre bien ce phénomène : la transformation de ce lieu emblématique en un espace associé à une clientèle majoritairement non-européenne et la disparition de la vente d’alcool sont perçues comme des signes de la dégradation du centre-ville et du déclin de la communauté locale.
- Les incertitudes de l’avenir résidentiel
Les électeurs votant pour le Rassemblement National, souvent issus des classes moyennes, ressentent une profonde inquiétude face à l’évolution de leur quartier, ils craignent une dévalorisation de leur patrimoine immobilier liée à l’arrivée de nouveaux habitants, perçus comme différents (immigrés, minorités), cette peur est alimentée par un discours ambiant sur le grand remplacement (Faury, 2024, p. 107) qui nourrit un sentiment d’invasion et de perte de contrôle sur leur environnement.
L’achat d’une maison représente pour eux un accomplissement social et économique, or, la perspective de voir leur quartier se transformer en un lieu moins sécurisant remet en question cette stabilité acquise. Ils se sentent piégés dans des quartiers qu’ils jugent en déclin, incapables de vendre leur bien sans subir de lourdes pertes financières, cette peur de la dévalorisation économique se mêle à une peur identitaire.
Les habitants interrogés expriment une forme de misère de position (Faury, 2024, p. 109) , c’est-à-dire une angoisse de perdre leur statut social relatif, ils craignent que leurs enfants ne puissent bénéficier des mêmes opportunités qu’eux dans un environnement qu’ils perçoivent comme de plus en plus dégradé.
Les électeurs d’extrême droite en Sud-PACA se sentent pris au piège entre un idéal d’espace homogène et inaccessible et une réalité multiculturelle qui les inquiète.
Ils cherchent à se protéger dans un entre-soi blanc (Faury, 2024, p. 114) mais en sont souvent empêchés par leurs moyens limités, cette situation les conduit à voter pour des partis comme le Rassemblement National, en espérant une solution politique à leurs problèmes. Ils deviennent ainsi des dominés dominants (Faury, 2024, p. 115) : acteurs et victimes des inégalités ethniques qu’ils dénoncent.
- Troisième partie : islamophobies du quotidien
L’islamophobie désigne les préjugés et discriminations envers les musulmans. Bien que contestée, cette notion est largement reconnue en sciences sociales. En France, les enquêtes montrent une forte corrélation entre l’expression d’opinions islamophobes et des positions politiques d’extrême droite. Si certains tentent de dissocier critique de l’islam et racisme, l’étude démontre que dans les discours quotidiens, musulman (Faury, 2024, p. 121) est souvent employé comme synonyme d’autres catégories racialisées.
Cette confusion révèle comment la religion peut servir de marqueur racial, rendant difficile de séparer critique religieuse et racisme. En réalité, l’islamophobie s’inscrit dans un racisme ordinaire, où les préjugés religieux renforcent les discriminations.
- Une question religieuse ?
L’islamophobie chez les électeurs du Rassemblement National n’est pas principalement motivée par une ferveur religieuse.
Les électeurs, souvent catholiques mais peu pratiquants, utilisent la religion comme un marqueur identitaire plutôt que comme une croyance profonde. Le catholicisme sert à définir une appartenance à la France, une identité française (Faury, 2024, p. 126) opposée à l’islam, perçu comme étranger et menaçant. Cette opposition religieuse sert de proxy pour des distinctions sociales et raciales plus larges. Même les athées qui votent pour le RN utilisent l’islam comme bouc émissaire, renforçant ainsi l’idée que l’islamophobie est moins liée à la religion qu’à un rejet de l’autre, souvent associé à des stéréotypes raciaux.
Ainsi, la religion est instrumentalisée pour justifier des positions politiques et sociales, et l’islamophobie est un moyen de consolider un sentiment d’appartenance à une communauté nationale définie par l’opposition à l’autre.
- Le sexisme des autres
Le sexisme des musulmans est exagéré et utilisé comme argument pour stigmatiser toute la communauté. On accuse les musulmans d’être plus sexistes que les autres, tout en ignorant les problèmes de sexisme au sein de la société française majoritaire. Le port du voile est souvent au cœur des critiques. On accuse les femmes voilées d’être opprimées par les hommes, tout en négligeant les autres formes d’oppression des femmes. Les femmes musulmanes sont confrontées à des attentes contradictoires (Faury, 2024, p. 133).
On leur reproche à la fois d’être trop voilées et donc pas assez françaises et pas assez voilées si elles ne correspondent pas aux stéréotypes de la femme musulmane soumise.
- L’islam comme menace
L’auteur analyse les représentations sociales du port du voile en France, à travers les discours d’électeurs interrogés. Le voile est moins perçu comme un choix personnel que comme un signe de provocation, voire de prosélytisme islamiste. Les femmes voilées sont ainsi dépeintes tantôt comme des victimes manipulées, tantôt comme des actrices conscientes et dangereuses d’un projet d’islamisation de la société.
Cette double représentation est influencée par le statut social des femmes concernées : une étudiante en médecine (Faury, 2024, p. 135) est davantage perçue comme une menace que comme une victime. Les discours recueillis révèlent également une méfiance profonde à l’égard de l’islam, perçu comme une force agissante, cherchant à imposer ses valeurs et à transformer la société française.
L’auteur révèle que l’islamophobie en France est profondément ancrée dans les représentations sociales, notamment chez les électeurs d’extrême droite. Les pratiques religieuses musulmanes sont perçues comme étrangères et menaçantes pour la société française, suscitant des réactions de rejet et de méfiance.
Ce rejet s’appuie sur une construction sociale qui présente l’islam comme une religion incompatible avec les valeurs françaises, tout en la suspectant d’être une force subversive cherchant à imposer ses normes. Les musulmans sont ainsi souvent perçus comme des intrus ou des ennemis intérieurs (Faury, 2024, p. 146).
L’islamophobie se nourrit d’un racisme plus généralisé à l’égard des minorités ethniques et raciales. Elle se manifeste dans la vie quotidienne par des actes de discrimination, d’exclusion et de violence. Les médias, la politique et les discours sociaux contribuent à renforcer ces représentations négatives, créant un cercle vicieux qui marginalise les musulmans et alimente les tensions sociales.
- Quatrième partie : votes blancs
L’auteur examine les jugements sur les électeurs du Rassemblement national, qui oscillent entre condamnation morale et empathie face à leur souffrance sociale. D’une part, certains cherchent à se distancier de ces électeurs, tandis que d’autres tentent de comprendre leur vote comme une réponse à des difficultés socio-économiques. Cependant, cette empathie tend à minimiser la dimension raciste du vote RN, qui est un facteur essentiel dans l’analyse des motivations des électeurs.
Le racisme est présenté comme un système de signification structurant les interactions sociales, et il est crucial de l’intégrer dans l’analyse sociologique.
Le chercheur insiste sur l’importance de relier les manifestations individuelles de racisme à des réalités collectives (Faury, 2024, p. 151). Ainsi, le vote RN est perçu comme une affirmation d’une position dans une hiérarchie raciale, permettant aux électeurs de se situer au sein du groupe majoritaire tout en se démarquant des minorités.
- Bonne et mauvaises migrations
L’auteur explore les attitudes des électeurs du Rassemblement national envers l’immigration, soulignant une distinction entre les bonnes et mauvaises migrations (Faury, 2024, p. 155). Après l’invasion de l’Ukraine, une majorité des électeurs de Marine Le Pen a exprimé un soutien pour accueillir les réfugiés ukrainiens tout en rejetant les migrants non européens.
Cette dichotomie reflète une frontière raciale dans le discours migratoire en France, où les électeurs, souvent issus de l’immigration eux-mêmes, valorisent leur propre intégration réussie tout en légitimant des positions xénophobes envers d’autres groupes, notamment maghrébins et turcs.
Les récits de fierté liés à leurs origines sont utilisés pour justifier des attitudes hostiles envers les minorités non blanches, permettant ainsi aux électeurs de se blanchir (Faury, 2024, p. 156) et de se maintenir dans le groupe majoritaire.
Ce rejet des autres est perçu comme une manière de renforcer leur propre identité nationale et de se démarquer dans la hiérarchie raciale.
- Distinctions raciales
Le texte aborde la complexité des distinctions raciales à travers le témoignage d’Ernesto (Faury, 2024, p. 158), un surveillant pénitentiaire brésilien naturalisé français. Bien qu’il ait lui-même subi des discriminations raciales en France, il exprime des opinions très négatives envers les Arabes et les musulmans, qu’il perçoit comme ne respectant pas les manières de vivre françaises (Faury, 2024, p. 159).
Ernesto se sent victime d’un racisme qu’il considère comme une réaction normale des Français face à l’immigration, et il cherche à se distancier de groupes qu’il stigmatise. Son vote pour des partis d’extrême droite, comme le RN, reflète son désir de renvoyer les immigrés qui ne s’intègrent pas, tout en affirmant sa propre assimilation. Il se positionne ainsi comme un bon Français, utilisant ses propres réussites pour se démarquer des minorités qu’il dévalorise.
Ce phénomène de stigmatisation des autres groupes minorisés est une stratégie pour alléger sa propre marginalisation. bien que les électeurs non blancs du RN soient rares, leur vote peut être perçu comme un moyen de se distancier des groupes les plus stigmatisés.
- Le racial et le populaire
L’enquête explore les expériences de rejet et d’altérisation vécues par des électeurs du RN, en particulier ceux issus de milieux populaires.
À travers le témoignage de Nicole (Faury, 2024, p. 163), une retraitée ayant migré vers le sud de la France après la fermeture de son usine, on observe comment elle et sa famille ont été perçus comme des étrangers en raison de leurs origines régionales. Malgré leur sentiment d’appartenance à la France, ils subissent des discriminations locales. Nicole exprime une fierté nationale, mais ses messages sur les réseaux sociaux révèlent des attitudes xénophobes, notamment envers les Arabes et les musulmans.
Le couple Robert et Marie (Faury, 2024, p. 165), également issus de milieux ouvriers, partage des expériences similaires de rejet à leur arrivée dans le sud. Ils se sentent stigmatisés et accusés de manger le pain des locaux. Leur discours reflète une hostilité envers les groupes racialisés, qu’ils associent à la dégradation de leur environnement. Robert, en particulier, exprime des opinions très dures sur les minorités, tout en craignant de perdre son statut de propriétaire, ce qui le relie à une peur de déclassement social.
Leur vote pour le RN est un acte d’affirmation de leur identité nationale et de leur respectabilité, en opposition à ceux qu’ils considèrent comme plus étrangers (Faury, 2024, p. 168). Ce choix électoral est perçu comme un moyen de se conformer aux normes du groupe majoritaire et de renforcer leur statut social. Ainsi, voter pour le RN devient une stratégie d’intégration et de défense de leur place dans la hiérarchie sociale, tout en utilisant des connotations nationalistes pour justifier leurs opinions.
Les processus de racialisation sont en constante évolution, et la race n’est pas un concept fixe. La position d’un individu dans la hiérarchie entre majoritaires et minoritaires peut changer, se maintenant ou se fragilisant selon les circonstances. Les électeurs du RN, même s’ils se sentent dominants sur le plan racial, expriment une inquiétude quant à leur propre statut, craignant d’être minorisés. Ce sentiment de dépossession est accentué par la perception que les groupes minoritaires sont trop nombreux et ne respectent pas les normes attendues. La figure du bon immigré (Faury, 2024, p. 168) est valorisée, car elle représente une relation idéale entre majoritaires et minoritaires. Lorsque cette dynamique est perturbée, les minorités sont perçues comme menaçantes, suscitant des émotions négatives. L’hostilité raciale émerge souvent d’une remise en question d’un ordre racial considéré comme naturel.
Les électeurs d’extrême droite, bien qu’attachés à cet ordre, ne sont pas toujours ses principaux bénéficiaires, ce qui renforce leur discours raciste. Leur vote pour le RN peut être vu comme une défense de leur condition majoritaire, face à une menace perçue de minorisation.
- cinquième partie : logiques d’une normalisation
Cette partie aborde la légitimité du vote pour le RN et comment cette préférence électorale a évolué. Historiquement, voter pour Marine Le Pen était perçu comme honteux, entraînant une sous-déclaration dans les sondages.
Cependant, cette stigmatisation semble diminuer, notamment après les élections régionales de 2021, où les électeurs ont peut-être surestimé leur intention de voter RN.
Le vote pour le RN est de plus en plus accepté socialement, se conformant aux normes des groupes sociaux. Les préférences politiques sont influencées par les interactions sociales, et le vote est souvent un reflet des opinions collectives plutôt que des choix individuels. Ainsi, la normalisation du RN s’explique par des perceptions et des expériences partagées qui rendent ce vote socialement acceptable.
- un vote stigmatisé ?
L’enquête aborde la dynamique sociale entourant le vote pour le Rassemblement National en France. Il souligne que les électeurs du RN évoluent souvent dans des environnements où leurs opinions politiques sont largement partagées, ce qui renforce leur sentiment de légitimité. Les témoignages d’électeurs, révèlent une incompréhension face aux résultats électoraux nationaux, qui semblent en décalage avec leurs perceptions locales. Isabelle (Faury, 2024, p. 178), par exemple, exprime sa surprise face à la victoire d’Emmanuel Macron, affirmant que dans son entourage, tout le monde vote pour le RN. L’auteur met en lumière comment cette homogénéité politique peut neutraliser les stigmates associés au vote RN, en le présentant comme une norme plutôt qu’une déviance.
Les électeurs reconnaissent leur rejet de certaines minorités, mais insistent sur le caractère collectif de leurs opinions, ce qui leur confère une légitimité. Les discussions quotidiennes, même dans des contextes informels comme les courses au supermarché, renforcent cette perception partagée des problèmes liés à l’immigration et à l’insécurité.
l’auteur critique l’idée que le vote RN serait le résultat d’un repli sur soi ou d’une crise du lien social, arguant plutôt qu’il s’agit d’une expression de sociabilités partagées et d’un sentiment d’appartenance à des groupes sociaux spécifiques. Cette analyse met en avant la complexité des motivations derrière le vote RN, qui ne se limite pas à un simple acte protestataire, mais s’inscrit dans un contexte social plus large.
- antagonismes sociaux
L’auteur aborde les antagonismes sociaux liés au vote, en particulier celui en faveur du RN. Il souligne que le vote est une expression des identités de groupe, souvent en opposition à d’autres groupes sociaux. Les électeurs du RN, bien que stigmatisés dans certaines régions, légitiment leur choix par des récits d’expériences vécues, se sentant souvent incompris par ceux qui n’ont pas partagé leurs réalités. Ils perçoivent les critiques sur le racisme comme des jugements de valeur de la part d’individus privilégiés, souvent de gauche, qui n’ont pas connu les difficultés qu’ils ont affrontées.
Les électeurs du RN se distinguent par un capital culturel relativement faible par rapport à leur capital économique (Faury, 2024, p. 190), valorisant le travail plutôt que l’éducation. Ils ressentent un mépris de classe de la part des élites culturelles, qu’ils associent à une arrogance et à un angélisme. En revanche, ils respectent les figures économiques qui réussissent par le travail, tout en critiquant les riches jugés excessifs ou illégitimes. Ce phénomène crée un hiatus entre les perceptions subjectives des inégalités sociales et les réalités économiques, où les différences culturelles deviennent plus clivantes que les écarts de richesse.
- antagonisme politiques
Les électeurs du RN expriment des aversions envers la gauche, qu’ils perçoivent comme trop favorable aux immigrés et déconnectée de leurs préoccupations. Cette perception est renforcée par une déception croissante envers la droite, notamment à cause de figures comme Nicolas Sarkozy, jugé comme ayant trahi ses promesses. Les électeurs, souvent déçus par la droite, se tournent vers l’extrême droite, illustrant une porosité électorale croissante.
Les critiques envers les élites politiques, qu’elles soient économiques ou culturelles, sont omniprésentes. Les politiques sont souvent perçus comme des profiteurs et des voleurs (Faury, 2024, p. 196), utilisant leur pouvoir à des fins personnelles.
Emmanuel Macron incarne cette dualité, étant critiqué pour son appartenance au monde de l’argent et pour son discours jugé hypocrite. Les électeurs expriment un scepticisme général envers tous les partis, considérant le monde politique comme homogène et éloigné de leurs réalités quotidiennes. Cette méfiance croissante envers les élites politiques favorise le vote pour le RN, perçu comme une alternative légitime dans un paysage politique décevant.
- croire en Marine
l’auteur explore la perception des électeurs envers le Rassemblement National et sa leader, Marine Le Pen. Malgré une défiance généralisée envers les partis politiques, certains électeurs voient le RN comme une alternative, notamment en matière de lutte contre l’immigration. Des témoignages révèlent que, bien que sceptiques, ces électeurs estiment que le RN pourrait apporter des changements, même s’ils reconnaissent que tous les partis politiques ont leurs défauts.
Des figures comme Laurent (Faury, 2024, p. 198), Philippe et Christophe expriment des doutes sur l’intégrité des politiques, mais certains, comme Christophe, voient le RN comme le seul capable de répondre à leurs préoccupations migratoires. D’autres électeurs, comme Monique, montrent un attachement fort à Marine Le Pen, qu’ils perçoivent comme une voix authentique et réaliste. Monique, par exemple, a commencé à voter pour Le Pen après avoir été longtemps abstentionniste, attirée par ses discours sur l’immigration.
Elle se sent comprise par Le Pen et admire sa capacité à s’exprimer clairement. Ce soutien est souvent motivé par des aspirations sociales et politiques spécifiques, et même si le programme du RN reste flou pour certains (Faury, 2024, p. 202), l’identification à la figure de Le Pen devient un repère électoral essentiel. En somme, le RN, malgré ses controverses, suscite des espoirs chez des électeurs qui cherchent une alternative à l’offre politique traditionnelle.
- Zemmour, je le connais pas trop
Monique, une électrice, exprime sa confiance presque exclusive en Marine Le Pen, ce qui limite sa volonté de voter pour d’autres candidats, même ceux aux idées similaires. En 2022, elle n’a jamais envisagé de voter pour Éric Zemmour, car elle ne lui faisait pas assez confiance (Faury, 2024, p. 203). Sa méfiance ne découle pas de divergences politiques, mais plutôt d’un manque d’informations sur Zemmour et ses propositions.
Malgré le fort écho médiatique autour de sa candidature, Monique avoue ne pas le connaître suffisamment. D’autres électeurs, comme Ernesto (Faury, 2024, p. 204), affichent des opinions tranchées et votent pour Zemmour, le trouvant plus rigide et combatif que Le Pen. Cependant, beaucoup d’électeurs du RN ne considèrent pas Zemmour comme une option viable, souvent en raison d’une méconnaissance de sa personne et de son programme. Certains le jugent arriviste (Faury, 2024, p. 205) et expriment une indifférence face à sa candidature.
En fin de compte, la familiarité de Marine Le Pen avec l’électorat lui confère un avantage, alors qu’Éric Zemmour peine à établir une connexion avec les électeurs moins politisés.
- Acquiescer à l’extrême droite
La présence prolongée de Marine Le Pen et de son parti dans le paysage politique français a contribué à atténuer l’image radicale qui leur était souvent associée. Beaucoup de personnes qu’ont été interrogées ne voient pas son accession au pouvoir comme une rupture significative avec l’ordre politique actuel. Elles estiment que le programme du Rassemblement National ne pourra pas être entièrement mis en œuvre, même en cas de victoire. Cette anticipation d’une incapacité à agir, due à des contre-pouvoirs ou à l’impuissance des politiques, permet de relativiser une éventuelle victoire de Le Pen.
Des électeurs comme Chloé (Faury, 2024, p. 210), qui a voté pour le RN, partagent cette vision, pensant qu’elle ne pourra pas réaliser tout ce qu’elle promet. Bien que voter pour le RN suscite une certaine culpabilité, beaucoup, comme Chloé, ne considèrent plus ce parti comme aussi dangereux qu’auparavant. La perception du RN a évolué, et il est souvent comparé à une version moins extrême qu’au temps de Jean-Marie Le Pen.
Cette transformation dans l’image du RN a permis à des électeurs, même peu engagés politiquement, de se sentir à l’aise de voter pour Marine Le Pen, rendant ce choix presque banal.
La stratégie de dédiabolisation du (RN), souvent associée à l’arrivée de Marine Le Pen en 2011, remonte en réalité à la création du parti en 1972. À l’époque, des membres d’Ordre Nouveau ont fondé le Front National pour rendre leurs idées plus acceptables et se conformer à la légalité démocratique.
Depuis ses débuts, le RN a cherché à normaliser les idées d’extrême droite, tout en maintenant une image de parti protestataire. Cette dualité lui permet d’attirer divers électeurs, oscillant entre respectabilité et radicalité.
Les opinions des électeurs, bien que parfois protestataires, reflètent des préoccupations partagées sur des enjeux sociaux, notamment le racisme et la défiance envers les élites politiques. Ainsi, le RN parvient à élargir son électorat tout en préservant son identité unique. En somme, le lepénisme continue de croître, attirant de nouveaux soutiens sans perdre son essence.
- Conclusion
Dans cette recherche sur le vote pour le RN, l’auteur a veillé à respecter une approche à la fois analytique et éthique : celle de prendre au sérieux les témoignages des personnes interrogées. Il était essentiel de considérer leurs craintes, doutes et incertitudes, ainsi que leurs affirmations parfois très tranchées sur le monde qui les entoure. L’objectif était de comprendre ce qui motive les électeurs du RN, les modes de vie qu’ils valorisent et les principes moraux qui leur tiennent à cœur.
Pour saisir comment l’extrême droite se normalise, il est crucial de comprendre la normalité (Faury, 2024, p. 217) sur laquelle reposent ses électeurs. Prendre leurs paroles au sérieux signifie également ne pas supposer que ces électeurs ne savent pas ce qu’ils font (Faury, 2024, p. 217) en votant pour le parti de Marine Le Pen, ni qu’ils se trompent dans leurs choix électoraux. Comme le souligne Stuart Hall, le succès et l’efficacité de l’extrême droite ne reposent pas sur sa capacité à duper des gens naïfs, mais sur le fait que son discours résonne avec des expériences vécues et bien réelles, ayant des effets pertinents (Faury, 2024, p. 217).
Bien qu’il ne faille pas exagérer l’importance du vote dans la vie des individus ordinaires, le vote pour le RN demeure un moyen pour ceux qui l’exercent d’exprimer, le temps d’une élection, les épreuves sociales qu’ils rencontrent, les problèmes auxquels ils font face et leurs interprétations de ces situations.
Des concurrences sociales racialisées
Les électeurs du sud-est de la France, bien qu’ils ne soient pas directement touchés par la pauvreté, vivent dans une précarité économique et sociale. Leur inquiétude ne se concentre pas tant sur l’emploi que sur la redistribution des ressources communes, comme les impôts, l’éducation de leurs enfants et l’accès aux services publics. Ces préoccupations alimentent une politisation en faveur du Rassemblement National, où ils se sentent souvent lésés, donnant beaucoup sans recevoir en retour.
Les inégalités sociales et raciales se manifestent dans les domaines fiscaux, scolaires et résidentiels, où les groupes minoritaires sont perçus comme des concurrents indésirables.
Ce ressentiment s’étend également à l’État, accusé de favoriser les immigrés au détriment des citoyens français. La dégradation des services publics et la compétition pour les ressources exacerbent le racisme, qui à son tour fragilise l’État social. Enfin, la valorisation des territoires et l’arrivée de ménages aisés accentuent les inégalités, renforçant la hiérarchisation des espaces et les tensions raciales.
- Rester majoritaire
Prendre en compte les discours des électeurs du RN implique de reconnaître le racisme comme une perception et une position dans les rapports de force, plutôt que comme une simple ignorance.
Le vote pour le RN représente une tentative d’exercer un pouvoir, souvent racial, dans un contexte de relations entre majoritaires et minoritaires. Bien que ces électeurs puissent ressentir des difficultés sociales, ils se situent majoritairement du bon côté (Faury, 2024, p. 222) des inégalités ethnoraciales en France. Leur sentiment de menace face à une possible minorisation les pousse à défendre leur position, ce qui politise leur statut majoritaire. Ainsi, leur soutien à l’extrême droite reflète un désir de préserver un ordre social qu’ils perçoivent comme en danger.
- Dénis et lucidités
La sociologie, souvent, arrive après les événements marquants. Son rôle n’est pas de déterminer les choix politiques d’une société, mais plutôt d’apporter une lucidité sur des réalités parfois difficiles à accepter. Par exemple, la dimension raciale du vote pour le Rassemblement National est souvent ignorée, considérée comme limitée à certaines régions, comme le sud de la France, alors que cela n’est pas prouvé par des études. De plus, certains pensent que les préoccupations socio-économiques, comme le chômage, masquent cette question raciale, alors qu’elles ne sont pas exclusives l’une de l’autre. Il est essentiel de reconnaître que le racisme joue un rôle central dans l’électorat du RN, et le réduire à une simple réaction à des problèmes économiques est une erreur. La racialisation est un processus autonome qui influence les opinions politiques. Ignorer l’importance du racisme dans le soutien au RN, c’est mal comprendre la dynamique de ce mouvement.
De plus, minimiser le racisme dans les attitudes politiques peut renforcer le discours du RN, qui cherche à se distancier de cette image. Les électeurs du RN ne votent pas uniquement par colère ou frustration, mais expriment des désirs politiques spécifiques, souvent teintés de racisme. Il est crucial de ne pas considérer le vote pour l’extrême droite comme un simple rejet du système, car cela ne tient pas compte des réalités politiques actuelles.
Le racisme est une construction sociale qui peut évoluer, et les promesses du RN, qui mêlent reconnaissance et amélioration des conditions de vie, séduisent de nombreux électeurs.
Pour contrer cette montée, il est nécessaire de proposer des alternatives solides qui répondent aux préoccupations économiques et sociales des électeurs. La lutte contre l’extrême droite doit se faire sur plusieurs fronts, en intégrant des actions à la fois électorales et sociales.
Enfin, la sociologie a un rôle important à jouer en identifiant les phénomènes structurels qui influencent les attitudes politiques. Comprendre le RN et ses électeurs nécessite de reconnaître que leur soutien est le reflet d’une société qui, dans son ensemble, penche vers des normes déjà établies.